CP | Zakia Khattabi présente une loi obligeant fabricants et vendeurs à informer le consommateur du caractère réparable de leurs appareils
Ce lundi 12 septembre, la Ministre fédérale de l’Environnement, Zakia Khattabi, a soumis son projet de Loi sur le « Repair Index » aux différents organes d’avis : industrie, secteur de la distribution, ONG et société civile. Inspirée du modèle français, cette législation qui s’inscrit dans la dynamique de l’économie circulaire, chère à la Ministre verte, vise à augmenter la réparabilité et la durée de vie des appareils tout en informant au mieux le consommateur sur ces aspects.
Il ressort des chiffres de Recupel que, chaque année, environ 245.000 tonnes d’appareils électriques et électroniques sont mis sur le marché en Belgique : des machines à laver aux télévisions, en passant par de plus petits appareils électroniques comme les smartphones et les laptops. Tous ces appareils ont un impact significatif sur l’environnement. Ils nécessitent de grandes quantités de matières premières, produisent des montagnes de déchets, et génèrent des émissions de CO2 non-négligeables lors de leur production. Selon une étude menée par la KUL, intitulée « Circular economy indicators for consumer goods », la production d’appareils électriques pour le marché belge génère environ 3 millions de tonnes d’émissions de CO2 par an. Cela équivaut à 20% des émissions annuelles de CO2 produites par le logement en Belgique.
Autant d’éléments qui ont poussé Zakia Khattabi à faire de ce dossier l’une de ses priorités : « 80 % de l'impact environnemental des produits est déterminé lors de la phase de conception. Au-delà de l’attention que nous devons porter sur notre manière de consommer, il nous faut repenser nos modes de production. Nous devons passer du modèle linéaire extraire-fabriquer-consommer-jeter à un modèle circulaire permettant d’optimiser l’utilisation des ressources en réutilisant, réparant ou recyclant. Ceci afin d’utiliser moins de matières premières, de produire plus localement, et de développer un système économique résilient quadruplement bénéfique : bon pour l’emploi, l’environnement, la santé et le portefeuille. Avec l’indice de réparabilité, nous avançons clairement en ce sens ! »
Environ 14% de l’empreinte des matériaux générée par les biens de consommation des ménages belges sont produits par les appareils électriques. Cette empreinte traduit la quantité de matières premières qui a été nécessaire de par le monde pour fabriquer ces biens. Les activités d’exploitation minière liées à l’exploitation des matières premières génèrent une pression élevée sur l’environnement local. Cela se traduit par une importante perturbation des écosystèmes, qui résulte notamment de la pollution locale de l’eau et des sols. La demande croissante de matières premières fait monter la pression pour ouvrir de nouvelles mines en Europe. La demande se fait aussi plus pressante pour organiser l’exploitation des grands fonds marins à grande échelle. Le milieu marin risque de s’en trouver perturbé. « Pour certaines matières premières, l’approvisionnement n’est pas assuré pour des raisons économiques ou géopolitiques. Cela constitue une menace pour la transition énergétique dans la mesure où celle-ci nécessite beaucoup de matières premières critiques pour créer les infrastructures de production et de stockage d’énergie verte. L'utilisation excessive des matières premières était déjà mise en évidence dans le rapport "Limits to Growth" du Club de Rome en 1972. Il est nécessaire de prendre cet enjeu à bras le corps ! Raison pour laquelle j’ai mis sur la table du gouvernement la création d'un observatoire pour analyser les flux de matières premières vers, depuis et à l'intérieur de la Belgique, y compris l'évolution des prix sur le marché mondial.», déclare la Ministre.
Grâce à un repair score allant de 0 à 10, l’indice de réparabilité indiquera au consommateur le degré de réparabilité de l’appareil : plus le score sera élevé, plus l’appareil sera réparable. Ce score tiendra en compte de plusieurs facteurs : la facilité de démontage, la disponibilité des pièces de rechange et leur délai de livraison, le prix des pièces détachées, la disponibilité des informations techniques et des manuels d'entretien et de réparation.
Une durée de vie plus longue permet de réduire le coût du cycle de vie d’un appareil. Ce coût prend en compte à la fois le prix d’achat, la durée de vie ainsi que le prix de l’entretien et de la réparation. Des études de cas menées avec des aspirateurs et des machines à laver démontrent que cela revient souvent moins cher de faire réparer un appareil plutôt que de le remplacer par un nouveau. Des appareils offrant une durée de vie plus longue alimentent aussi un plus grand marché de seconde main. « Non seulement l’impact sur l’environnement est moindre, mais il y aussi une plus grande disponibilité d’appareils de qualité à moindre prix pour un plus large groupe de personnes. », souligne Zakia Khattabi. « Toujours sur le volet socio-économique, la mise sur le marché d’un plus grand nombre d’appareils aisément réparables présente également un intérêt pour l’emploi local. Alors que la production des nouveaux appareils est principalement localisée en dehors de la Belgique. »
L’indice de réparabilité sera instauré de façon progressive : « Nous allons commencer par les appareils très utilisés comme les aspirateurs, les machines à laver, les lave-vaisselles, les tondeuses, les laptops, les smartphones et les tablettes. A terme, l’indice sera étendu aux vélos. Pour les smartphones et les laptops, les fabricants devront aussi indiquer combien de temps ils supporteront le logiciel. Nous éviterons ainsi que des gens doivent se défaire d’un appareil qui fonctionne bien pour la seule raison que le logiciel a changé. »
La loi prévoit aussi la possibilité d’obliger les fabricants à afficher la durée de vie escomptée d’un appareil, ou encore d’imposer que les appareils répondent à une réparabilité minimale et à une durée de vie minimale.